Comme son nom l’indique, le labo d’idées s’intéresse de près à la vie des… territoires : “On a retenu le mot latin, car il veut dire aussi bien ‘terre’ que ‘le lieu où l’on habite’”, nous instruit le trentenaire, sûr de son positionnement. “Aucun autre think tank ne nous voit comme concurrent, tous veulent travailler avec nous”, glisse-t-il au-dessus de son café crème.
Eclairer de bas en haut. La vie hors de Paris, “c’est l’angle mort du débat public”. Et de nos dirigeants ? La preuve : début juin, une dizaine de conseillers élyséens l’ont écouté attentivement présenter son dernier rapport, dédié aux déplacements de la jeunesse rurale. Celle pour qui “tout est loin” et où faire sans voiture relève de “la mission impossible”. La commission du Développement durable de l’Assemblée voulait aussi le rencontrer, la dissolution en a décidé autrement.
Repris une cinquantaine de fois dans les médias nationaux ou régionaux (“La PQR, c’est très important pour moi”), ce rapport sur la fracture rurale est déjà un joli coup, alors même qu’il ne s’attarde que sur le diagnostic. “On publiera les solutions dans un second temps, autrement les médias ne parlent que d’elles”, feuilletonne-t-il, tout en prenant soin de commander auprès d’universitaires ses autres rapports (sur les frontaliers ou la démocratie locale).
Parrainages privés. La jeune structure revendique aussi son indépendance, tant vis-à-vis de l’Etat (elle n’a pas de financement public) que de ses sponsors privés (Engie, Axa, la Macif et la Capeb). “Je veux vraiment éviter d’être marqué”, insiste son créateur, qui relève au passage qu’il bosse sur “l’un des rares sujets qui échappent à la polarisation”.
“Les entreprises ont besoin d’un acteur pour s’oxygéner par des travaux académiques” sur ce thème, soutient Niels Gaubert. Le directeur de Havas Territoires lui offre un mécénat de compétences, comme pour la soirée de lancement de la structure, en avril.
Science diffuse. D’origine auvergnate, Delage assume avoir installé son institut à Paris “pour peser”, mais n’exclut pas de se délocaliser dans des festivals pour aller “au-delà des publics initiés”. En cours de constitution, son conseil scientifique se veut d’ailleurs le reflet d’une France extramuros, avec des personnalités comme Salomé Berlioux, ex-plume de Jean-Marc Ayrault au Quai d’Orsay et fondatrice de Chemins d’avenir (une asso dédiée aux jeunes ruraux), ou Anaïs Voy-Gillis, docteure en géographie.